En 1923, pour que l'Union
des Artistes puisse continuer à venir en aide aux vieux
artistes que l'âge a privés de travail, donc de ressources,
Max Dherly a une idée. Il demande aux plus grosses vedettes du
monde du spectacle du moment d'exécuter gratuitement un numéro
de cirque lors d'une soirée exceptionnelle. Les recettes iront
aux œuvres sociales de l'Union. Les artistes, que l'idée
enthousiasme, prêtent leur concours de bonne grâce.
Le spectacle est un tel
succès, que le Gala de l'Union des Artistes deviendra une
tradition qui perdurera pendant des décennies.
Les frères Bouglione
mettent le Cirque d'Hiver à la disposition de l'Union.
Ainsi, d'année en année,
les membres célèbres et moins célèbres du monde du spectacle
se font un devoir d'être présents, sur la piste ou dans la
salle. Le public mondain se doit d'y être vu. Le programme est
"sponsorisé"
par des maisons de produits de luxe, des artistes peintres en
vogue font don d'une œuvre pour illustrer sa couverture, et
les places valent très cher.
L'organisation du gala est
interrompue en 1939 et reprendra en 1947.
Une préoccupation est
constante pour les organisateurs successifs : faire recette,
et pour ce faire, s'assurer de la participation de vedettes de
grand renom. Les convaincre, bien que ce soit "pour la bonne cause", est un travail incessant.
Les recettes du gala sont
réparties en cinq caisses : caisse de secours, allocation
vieillesse versée aux vieux acteurs qui ne perçoivent pas de
retraite ou pas suffisamment, assistance judiciaire,
assistance médicale chargée de payer le ticket modérateur au
dispensaire du spectacle et caisse du cercle culturel qui
s'occupe des jeunes acteurs.
Lorsqu'en 1958 se crée le
nouveau Syndicat français des acteurs, la tradition du gala
est conservée avec l'appellation Gala de l'Union des Artistes.
Le gala est filmé par la
télévision pour la première fois en 1959. Ainsi les projection
dans des salles de cinéma augmenteront les recettes.
Mais l'histoire du gala
n'est pas un long fleuve tranquille. Elle a connu des période
chaotiques.
En 1956, une tentative de
profiter de la présence de nombreuses vedettes et stars
internationales en vacances sur la Croisette pour organiser un
gala d'été à Cannes se solde par un échec. En effet, les stars
internationales annoncées brillent par leur absence.
En 1966, une nouvelle
tentative de sortir le gala de l'univers de la piste en le
transportant sur la scène de l'Opéra de Paris. Il en résulte
un spectacle de music-hall... mal préparé, la représentation
est chaotique, les spectateurs déçus, la presse assassine...
la pérennité du gala est menacée. D'autres manifestations sont
suggérées afin de faire entrer de l'argent... des soirées
théâtrales au bénéfice de l'Union des artistes ont lieu en
1967 ainsi que diverses initiatives... mais les difficultés à
verser des allocations s'accroissent. Se pose alors une
alternative : dissoudre l'association ou relancer le gala dans
sa pure tradition.
Le gala de 1969, de retour
au Cirque d'Hiver et dont le thème est de faire revivre tous
les grands numéros classiques de l'histoire du cirque, est un
véritable succès, bien que la soirée soit encore déficitaire.
Il est pour la première fois filmé en couleur. Désormais,
l'Union confie le tournage au réalisateur Claude Barrois et se
charge elle-même de vendre le film monté à l'ORTF et aux
télévisions étrangères.
De 1970 à 1973,
Jean-Pierre Cassel est aux commandes. Il garantit et la santé
financière de l'organisation et la qualité artistique du
spectacle. Il rend au gala son prestige. Les recettes sont
réparties par moitié entre la caisse de secours du Syndicat
français des artistes et l'Union sociale du spectacle.
Le 42e gala de 1975 se
déroule au Champ de Mars, sous un chapiteau comptant mille
places de plus que le cirque d'hiver. Toutes les places sont
vendues, ce qui assure un apport financier supplémentaire.
Mais la participation de vedettes est de plus en plus
difficile à obtenir.
L'idée vient alors d'aller
chercher les stars où elles sont et de déplacer le gala à Los
Angeles. Des acteurs français participent, malgré encore une
fois la défections des plus grands noms. Cela devient un
tournage américain pour la télévision américaine et la mise en
valeur des seules stars américaines... Financièrement, c'est
catastrophique. Une avance de la télévision allemande aide à
régler les premières factures... Mais l'addition est lourde.
En 1977, reprise en main
par le trésorier de l'Union. Le tournage est à nouveau confié
à Claude Barrois dont les films se sont toujours très bien
vendus... On constate déjà en 1979 que les artistes de
variétés et les animateurs de télévision sont plus nombreux
que les acteurs sur la piste...
1981. Le gala, rebaptisé "La
nuit des étoiles", se déroule à l'hippodrome de
Longchamp sous le chapiteau Jean Richard. D'importants frais
sont à la charge de l'Union : location d'une salle et paiement
des professeurs pour les répétitions, déplacements, location
du chapiteau, décors, costumes, avoine pour les chevaux... le
déficit se creuse. Les artistes qui se sont produits
bénévolement sont déçus qu'aucun bénéfice n'ait été dégagé
pour leurs pairs en difficulté. Le gala est à bout de souffle.
Décision est prise la mort dans l'âme en 1983 de mettre
l'association en sommeil.
C'est en 2010 que le gala
renaît, à l'initiative de l'Adami et avec le soutien
d'Audiens. A nouveau des artistes, en prêtant leur concours et
en prenant des risques, aident l'Union des Artistes à remplir
sa mission d'entraide. Le fonds "gala" est à nouveau alimenté
régulièrement de sommes substantielles.
Dans le système économique
actuel, outre un producteur, France Télévisions est un
partenaire déterminant dans l'existence du gala, car il ne
peut y avoir de gala sans diffusion télévisuelle. L'Union des
Artistes est attachée au service public mais sa participation
est sujette à remise en cause à tout moment...
Source
:
Marie-Ange
Rauch - Histoire du Gala - in ouvrage
publié à l'occasion de l'exposition "Le
Gala de l'Union des Artistes, 1971-1975,
photographies
de Daniel Lebée"
présentée au Musée Carnavalet
du
25 janvier au 25 juin 2006.