Printemps
1917
En pleine guerre, un groupe
d'artistes du spectacle éprouve le besoin de se regrouper dans
le but de constituer une association. Réunis autour de Félix
Huguenet (comédien et chanteur d’opérette bien connu), ils
créent le 11 mai l'Union des Artistes dramatiques et lyriques
des théâtres français. Le premier motif est de protester contre
les mesures gouvernementales réduisant considérablement
l’activité des théâtres pour raison de sécurité. L’Union des
Artistes déclare dans une circulaire vouloir "s'opposer aux restrictions imposées
à l'exploitation théâtrale depuis la guerre, au manque de
considération au regard des artistes malgré les services rendus
aux malades, aux blessés, aux veuves, et affirme l'inanité des
efforts personnels et disséminés ; d'où nécessité de se grouper,
en dehors même de tout esprit mutualiste ou syndicaliste".
Septembre
1917 : 286
membres
L'Union entend être le siège
de l'arbitrage professionnel en jouant le rôle de médiateur
entre les directeurs de théâtre et les artistes. Elle est
soutenue par les directeurs.
1918 : 750 adhésions
L'Union se pose
comme l'unique association d'entraide et de défense des
intérêts professionnels.
1919
Le travail est rare. Lorsque
les artistes en trouvent, il est trop mal payé pour leur
permettre de faire face au coût de la vie.
En 1909 s'est créée la
Fédération générale du spectacle regroupant les différentes
branches du spectacle affiliées à la Cgt, dont un syndicat
d'acteurs qui existe depuis 1903.
La fédération mène alors une
lutte pour l'augmentation de tous les salaires, assortie d'une
clause stipulant que seuls les artistes et employés syndiqués
pourront être embauchés, et seuls les auteurs syndiqués pourront
être représentés. Cette clause entraîne des mouvements de grève
très durs entre 1919 et 1920 ainsi qu'un fort courant de
syndicalisation.
L'Union des Artistes, qui
souhaite demeurer une association autonome, donne alors la
possibilité à ses membres d'adhérer également au syndicat CGT.
La grève des
artistes est lancée le 25 septembre.
Le 26 septembre, Alexandre
Arquillère, artiste notoire, préside une réunion de
non-syndiqués. Dénonçant la clause, jugée comme une entrave à la
liberté du travail, ils demandent à l'Union de prendre en main
leurs intérêts auprès des directeurs et des pouvoirs publics si
nécessaire.
Des altercations éclatent.
Des artistes non-syndiqués refusent de jouer avec des syndiqués.
Il faut les interventions du
secrétaire général de la Cgt et du ministère de l'instruction
publique pour amener les directeurs à accepter les augmentations
de salaires. La Fédération retire sa clause relative à
l'embauche.
1920
L'affaire n'est pas
complètement réglée. Des grèves perlées touchent les théâtres
pendant toute l'année.
Arquillère crée un syndicat
professionnel libre. Le syndicat des artistes Cgt riposte en
remettant la clause contestée à l'ordre du jour. Des
membres de la Fédération montent des opérations coup de poing
pour interrompre les spectacles, et des mots d'ordre de grève
sont imposés aux comédiens sans les consulter. Face à cet
autoritarisme, certains commencent à donner leur démission du
syndicat Cgt.
1922
En 1920, la création du
parti communiste entraîne une scission au sein de la Cgt. Puis
en 1921 se constitue la Confédération générale du travail
unitaire (CGTU). Le dialogue est impossible entre les deux
confédérations, sans compter la présence de la Confédération des
travailleurs chrétiens (CFTC) créée en 1919. Ces divisions au
niveau national provoquent de violents débats considérés
comme plus politiques que syndicaux par de nombreux
artistes. Il en résulte en janvier la création d'un syndicat
autonome plus centré sur les problèmes exclusivement
professionnels.
L'Union des Artistes est
restée discrète pendant ces conflits. Elle compte alors 1600
adhérents. Elle fait figure de "valeur refuge", porteuse d'un projet de
rassemblement qui unirait tous les artistes interprètes tout en
leur permettant d'être syndiqués.
Devant la dispersion des
forces syndicales, un groupe d'artistes issus de l'Union, du
syndicat autonome et du syndicat professionnel libre, nommé "Comité
des trente", tente de réconcilier leus membres
.
Il est envisagé de dissoudre
les trois organisations et de fonder une société civile...
solution incompatible avec les activités de l'Union et repoussée
par les unionistes qui tiennent à leur statut d'association, de
plus reconnue d'utilité publique.
Ils convainquent les membres
du syndicat des artistes lyriques de les rejoindre, et 13 mars
1922 l'association prend le nom d’Union des Artistes dramatiques
et lyriques de langue française.
Suite à des
adhésions en masse, l'Union compte 3800 adhérents et devient
la plus importante organisation de défense des artistes
interprètes.
1923
Ayant développé un important
service d'entraide sociale, l'Union essaie entre autres, et tant
bien que mal, de subvenir aux besoins des vieux artistes qui
n'ont pas de retraite. Les fonds manquent douloureusement car
elle n'a d'autres ressources que la contribution financière de
ses adhérents et des participations volontaires, souvent
importantes, de membres "bienfaiteurs".
Vedette du théâtre et du
music-hall, Max Dearly a l'idée de créer un gala où se
produiraient gratuitement des artistes de renom se transformant
pour un soir en artistes de cirque, de music-hall, de sport.
L'idée séduit les plus grands noms du spectacle. Les recettes
des galas permettront d’alimenter la caisse d’aide sociale de
l'Union. Le gala perdurera, bon an mal an jusqu'en 1982.
Le 3 mars 1923 a
lieu le premier Gala de l'Union des Artistes
1925
L'Union interpelle les
pouvoirs publics sur le fait que les artistes n'ont d'autres
recours que la charité en cas de difficultés sociales. Elle fait
des suggestions qui sont très mal prises par la Mutuelle des
Artistes (fondée par le Baron Taylor en 1840), qui l'accuse
d'empiéter sur ses plates-bandes: allocation retraite,
maternité, décès, secours aux orphelins de la profession, maison
de retraite, etc.
Cette querelle profite à
ceux qui poussent l'Union à devenir un syndicat, trop à l’étroit
qu’elle est dans son statut d'association, oscillant entre un
rôle de mutuelle de secours et de syndicat. Harry Baur, comédien
très populaire, qui en est le président, milite dans ce sens.
Dans Comœdia, le bulletin de l'Union, il écrira cette phrase
visionnaire : "l'organisation sociale doit
supprimer la charité". C'est à cette tâche que l'Union
s'emploiera durant un demi-siècle.
25
novembre 1926
Assemblée générale houleuse.
Les arguments pour le changement de statuts sont pragmatiques :
• l'Union doit se développer
sur le plan économique : les syndicats peuvent en outre acquérir
des biens immobiliers, acquérir des actions, recevoir des
dons...
• seul un syndicat peut
ester en justice pour défendre les intérêts de la profession
qu'il représente...
• seul un syndicat peut
passer des accords avec d'autres syndicats, l'Etat et les
organisations patronales...
21
septembre 1927
L'Union devient l'Union des
Artistes, Chambre syndicale des artistes de langue française,
dramatiques, lyriques et cinématographiques.
Son influence s'étend à
l'ensemble du territoire. Néanmoins elle éprouve des difficultés
pour régler les questions d'ordre national. En effet, le manque
de considération dont elle (et les artistes en général) fait
l'objet, entrave ses négociations avec l'Etat sur les grands
sujets sociaux.
Depuis la victoire du Front
populaire aux élections législatives des 26 avril et 3 mai 1936,
les dirigeants de l'Union constatent une forte poussée politique
et syndicale dans les milieux artistiques de nature à favoriser
un rapprochement avec la Fédération du spectacle Cgt. Ce
rapprochement permettra à l’Union de sortir d’un certain
isolement vis-à-vis des autres professions du spectacle et
renforcera sa lutte incessante pour la reconnaissance sociale
des artistes. Le moment est donc tout à fait opportun pour une
adhésion à la Cgt.
3
Juillet 1936
L'assemblée générale vote à
une grande majorité l'adhésion à la Cgt.
L'Union compte 5500
membres et devient le syndicat d'artistes majoritaire en
France.
1940-1944
L'Union retrouve sa fonction
d'aide sociale qu'elle n'a d'ailleurs jamais abandonnée. La
guerre, la défaite et l'occupation allemande ne se prêtent guère
à une action revendicative. Les responsables de l'Union prennent
alors diverses initiatives de solidarité, dont le « Déjeuner des
artistes » qui permet aux plus démunis de se nourrir en ces
temps où la pénurie est la règle.
L'Union se tient le plus en
retrait possible des organisations de Vichy.
Dans les années 42-43 se
constitue au sein de la Résistance un syndicat des acteurs
affilié d'emblée à la Cgt clandestine.
Août
1944
A l'occasion de la
Libération de Paris, ses jeunes responsables s'imposent dans les
locaux de l'Union où ils tentent de prendre possession des lieux
non sans résistance de dirigeants de l'Union et surtout du
personnel. Ils s'autoproclament néanmoins Syndicat national des
acteurs (SNA).
1945
L' urgence de faire face aux
difficultés de l'après-guerre et à la reconstitution du
syndicat, contraint les deux groupes rivaux, résistants et
conseillers de l'Union élus avant-guerre, à cohabiter en
attendant une assemblée générale.
Après une assemblée
d'informations où André Luguet est désigné président du SNA, une
assemblée générale a lieu le 6 avril 1945 au théâtre du
Chatelet. Elle élit un nouveau Conseil où les anciens dirigeants
de l'Union restent présents aux côtés des nouveaux arrivants. Ce
compromis se retrouve dans le nouveau nom de Syndicat national
des acteurs (SNA), qui conserve en sous titre, Union des
Artistes dramatiques, lyriques, cinématographiques de langue
française. Bien que directeur du théâtre de la Renaissance, et
contrairement aux statuts du syndicat, Jean Darcante est élu
secrétaire général en raison de ses grandes qualités syndicales.
1947
Scission au sein de la CGT
et constitution de la Cgt Force Ouvrière.
1948
assemblée générale
historique à l'Opéra Comique pour envisager le maintien ou non
de l'affiliation du SNA à la Fédération du spectacle Cgt.
A une écrasante majorité,
ses membres décident de rester à la fédération, entre autres
parce que tous les corps de métier du spectacle s'y trouvent
réunis. La quitter pour une autre organisation ou se réfugier
dans l'autonomie est inacceptable.
Le SNA demeure donc LE
syndicat de la profession.
Mais l'évolution du métier,
la naissance et le développement de la décentralisation
dramatique et d’autre part le démarrage de la télévision et ses
incidences directes sur l'emploi et les conditions de travail,
cristallisent les dissensions au sein du conseil syndical entre
"anciens"
et "modernes".
Août
1957
Après plusieurs années de
querelles internes, une partie importante de la profession,
considérée alors comme sa partie la plus vivante et composée
d'un grand nombre de vedettes, décide, après plusieurs
tentatives de conciliation, de quitter le SNA et de se
constituer en un Comité national des acteurs (CNA) derrière la
figure de proue de Gérard Philipe.
Bientôt 800 adhérents, puis
1 000 et près de 1 500 donnent au CNA une importance telle que
les directions de la Fédération du spectacle et de la
Confédération Cgt sont contraintes de s'impliquer.
15
juin 1958
Mais au CNA, tout autant
qu’au SNA, il y a des artistes profondément attachés à
l'affiliation à la Cgt. Cependant il ne peut y avoir deux
syndicats d'artistes interprètes à la Cgt. Aussi l'idée de
réunification s’impose dès la scission. Les conciliations au
plus haut niveau créent finalement les conditions : deux
assemblées générales simultanées réunies séparément le même jour
décident de se retrouver dans une même assemblée générale et
votent pour leur réunion au sein de la Fédération du spectacle
Cgt. Les deux organisations sont dissoutes et deviennent le
Syndicat français des acteurs (SFA) coprésidé par Gérard Philipe
et Jacques Dumesnil.
1966
L'Union des artistes devient
une association autonome, ses statuts sont modifiés ainsi que
ses missions. Sous la présidence de Jean Marais elle continue
d'organiser le gala de l'Union des Artistes. Elle est également
chargée des affaires sociales et du service juridique.
La réunification va
contribuer au développement de l'unité de la profession.
Celle-ci va se poursuivre avec l'intégration progressive
d'autres syndicats d'artistes interprètes : music-halls, cirques
(1960), variétés (1963), danse (1967), chœurs (1968),
marionnettistes (1969).
1975
Le SFA devient le Syndicat
français des artistes interprètes.
1983
Après l’organisation de
galas déficitaires, l'association Union des Artistes est mise en
sommeil.
2000
A l'initiative de Michel
Gautherin, membre de la délégation générale du SFA, l'Union est
réactivée, dotée de nouveaux statuts et de nouvelles missions.
Robert Sandrey (ancien délégué général du SFA) en assure la
présidence jusqu'en 2005.
L'action de l'Union est
impulsée par l'historienne Marie-Ange Rauch, déléguée générale
2000-2005, ainsi que par Aristide Demonico, secrétaire général
2002-2015.
2005-2018
Arlette Téphany devient
présidente de l'Union des Artistes, fonction qu'elle honore
pendant treize ans, sauf pendant une courte période de six mois
durant laquelle la présidence est assurée par Pierre Santini.
Dans cette organisation
particulièrement masculine, il n'est pas anodin de noter que
pour la première fois elle est présidée par une femme (à
l'exception de Gaby Morlay, éphémère présidente en 1955 pour des
raisons "politiques").
Renaissance du Gala en 2010.
2018-2019
Après le décès d’Arlette
Téphany, la vice-présidente de l’Union Anie Balestra assure
l’intérim.
Commémoration du Centenaire de l’Union des Artistes.
2019
Anie Balestra est élue à la
présidence de l’Union des Artistes.